Pour ses 15 ans, la Cie de la Courte-Paille explore un texte bulgare.
"La vie bien qu'elle soit courte"
Compagnie de la Courte-Paille
Usine à gaz, Nyon.
Je 8 mai à 19h30/ve 9 à 20h30.
www.usineagaz.ch
info@lacote.ch
Basée à Crassier, dans le magnifique espace baptisé L'Atelier de Mlle F., dédié à la décoration, au théâtre et au conte, la compagnie de la Courte-Paille fête ses 15 ans. Pour l'occasion, la metteure en scène Fabienne Penseyres a opté pour un texte du dramaturge bulgare, célèbre en son pays, Stanislav Stratiev, intitulé "La vie bien qu'elle soit courte". A voir à l'Usine à gaz.
"C'est une fable satirique qui contient plusieurs strates de sens , explique Fabienne Penseyres. Le texte questionne le pouvoir que nous avons d'orienter notre vie et montre de façon drolatique la peur que les humains ont les uns des autres. On y découvre également une vision hautement loufoque de l'administration que Stanislav Stratiev décrit d'une main de maître, un peu à la manière de Kafka." La pièce est constituée de trois tableaux et d'innombrables personnages qu'interpréteront alternativement Aurélie La Rocca, Mehdi Duman et Olivier Magnenat. Trois comédiens professionnels, issus de l'Ecole Serge Martin, à Genève, pour les deux premiers, et de l'Ecole lausannoise des Teintureries, pour le troisième.
La Compagnie de la Courte-Paille a déjà mis sur pied plus d'une vingtaine de spectacles, de Lorca à Anouilh, en passant par Dubillard, avec cependant une prédilection pour des textes originaires des pays de l'est. "J'aime cet humour , commente Fabienne Penseyres. J'y trouve une façon de rire franche et libératrice qui est liée à l'histoire politique de pays qui ont connu le communisme."
Le rire comme exutoire
Tapissière et décoratrice de formation, "comme Molière" , aime-t-elle à dire, Fabienne Penseyres a touché à tous les métiers du théâtre avant de se lancer un peu par hasard dans la mise en scène il y a une vingtaine d'années. La Compagnie de la Courte-Paille est née d'une envie d'explorer les formes contemporaines de la création, en les associant à des dispositifs scénographiques originaux.
Présentée cette semaine à Nyon, "La vie bien qu'elle soit courte" raconte l'histoire rocambolesque d'un architecte nanti qui décide de changer de vie. "Mais sur le chemin d'un rendez-vous de chantier , détaille la metteure en scène, il perd son bouton de pantalon. Convaincu qu'on ne peut pas changer de vie dans cette tenue, il se met en quête d'un bouton de substitution, d'abord auprès des résidents craintifs d'un immeuble, puis auprès du personnel d'un atelier de réparation."
La liberté contre un bouton, tel est l'enjeu cocasse d'une pièce qui utilise les excès de la caricature et de l'absurde pour évoquer des questions fondamentales. "C'est une telle tragédie , s'enthousiasme Fabienne Penseyres, qu'on rit à n'en plus pouvoir." Selon Aurélie La Rocca, qui interprète pas moins de cinq personnages différents, dont une femme prude et coincée, une vamp ou une mère au foyer, "c'est précisément à travers le rire qu'il devient possible d'interpeller le public."
Fabienne Penseyres a opté pour un décor minimal. "On joue par terre, tout est nu" , explique-t-elle. Les espaces sont suggérés par un système roulant qui se déplace au fil des trois tableaux. Cette grande économie de moyens matériels, soulignée par une "lumière brute de décoffrage" , vise aussi à mettre en valeur la force du jeu des comédiens. Un jeu fait de chantonnements, de bruitages, de dialogues incisifs, où ces derniers doivent faire preuve d'adresse et de rapidité pour passer d'un personnage à l'autre.
"Certaines interventions durent entre trente secondes et une minute , commente Aurélie Rocca, ce qui est assez rigolo à faire. Chaque personnage est symbolisé par un accessoire, afin de faciliter tous les changements de personnalité qui rythment la pièce." Après les deux représentations à l'Usine à gaz, la petite équipe se produira au Festival Lausanne Estivale, puis entamera une tournée dans les écoles du canton de Vaud. Car, pour Fabienne Penseyres, "il est essentiel d'ouvrir les yeux et le coeur à nos têtes blondes, afin qu'elles puissent avoir accès à autre chose que leurs téléphones portables" .