Le collectif italien Strasse embarque un seul spectateur à bord d'une voiture. Et la rue devient scène de théâtre.
Drive_in #6 /Nyon
Tous les jours, 20h, 20h45, 21h30, 22h15, 23h (30').
Rendez-vous dans la cour de l'Usine à gaz.
cgavlak@lacote.ch
La jauge est pour le moins réduite. Tous les soirs, seuls cinq spectateurs du Far ont la chance d'embarquer, chacun leur tour, dans la voiture du collectif italien Strasse pour une virée "by night" dans les rues de Nyon. Pendant une demi-heure, assis à la place du mort, à côté d'une conductrice silencieuse, le passager est invité à découvrir sa ville avec un regard neuf. Sur le trottoir, sur la route, dans les champs, des silhouettes et des formes surgissent puis disparaissent, sans qu'on ait le temps de savoir ce qui est réel et ce qui ne l'est pas.
Cette expérience atypique s'intitule "Drive_in #6 /Nyon" et fait référence au cinéma en plein air, le Drive-in, où on regarde un film depuis le siège de son auto. Le chiffre 6 se réfère à Nyon, sixième ville dans laquelle les cinq artistes développent leur concept. Après cinq villes italiennes, dont Milan, il s'agit d'une première suisse.
"Pas de lieu abandonné"
"Nous avons été surpris par le fait qu'il n'y ait aucun lieu abandonné", expliquent les artistes quand on leur demande ce qui les a frappés pendant leurs repérages à Nyon. "Il n'y a aucun immeuble vide où se raconter des histoires. Nous avons plutôt vu des édifices en construction." Autre particularité: une certaine uniformité. "Architecturalement, il n'y a pas de points forts, tout semble se répéter."
Pas question, pour autant, de compenser ou de modifier les ambiances. L'équipe tient à prendre chaque lieu comme il est. Pour définir le trajet du véhicule, les cinq artistes ont donc observé la vie diurne pour s'en inspirer librement. "Nous avons été frappés par ces grandes routes qui filent vers la campagne, où il n'y a personne. Cela a nourri notre trame dramaturgique." Le vide périphérique de la ville donne de l'importance aux phares de la voiture, mettant littéralement en lumière le paysage nocturne.
Un point de vue
La pièce de théâtre se déroule alors dans l'esprit du spectateur comme un film intérieur. Le collectif a d'ailleurs réalisé les tout premiers essais de cette performance à l'aide d'une caméra fixée sur une voiture. Puis l'idée est venue de remplacer l'objectif par une personne. Et la voiture s'est muée en écran de cinéma. Avec la musique venant de l'autoradio, le long métrage est complet et pimenté par les mystères de l'ambiance nocturne. "La nuit, on n'est plus sur un mode productif et on est davantage réceptif à ce qui se passe autour de soi que dans la journée" , concluent les membres du collectif.