Après l'usage militaire, le drone devient un engin de course. Une start-up glandoise a investi ce créneau.
Si les streetboxes du chemin du Vernay, à Gland, ont des allures de paddock de Formule 1, ce n'est pas tout à fait un hasard. L'un d'entre eux abrite ni plus ni moins qu'une écurie de drones de course. Du nom de Lémantech Labs, la société vient de réaliser un joli coup lors de l'US national drone championship organisé en Californie. Grâce aux engins fabriqués par la start-up, le pilote australien Chad Nowak est monté sur la plus haute marche du podium dans les trois catégories (individuel, par équipes et freestyle) de l'un des premiers championnats professionnels du genre.
Une belle carte de visite pour cette société créée il y a deux ans. Après avoir longtemps travaillé dans une firme développant des appareils de mesure à haute vitesse pour le CERN, Yann Oeffner, Anthony Cake et Urs Schroffenegger, bientôt rejoints par Jérôme Meugnier, décident de s'adonner entièrement à leur passion: l'aviation. "Tout enfant rêve un jour de voler. Ce rêve est aujourd'hui à la portée de tout un chacun" , jubile Anthony Cake. Le Givrinois sait de quoi il parle, puisqu'il est à l'origine de la technologie qui permet de tutoyer Icare. Il y a huit ans, il fonde Immersion RC à Hong Kong. La société, à laquelle Lémantech Labs est étroitement associée, a développé des lunettes virtuelles qui donnent la sensation d'être réellement dans la cabine de l'appareil. Dans ces conditions, piloter un drone se situe à mi-chemin entre le jeu vidéo et l'aéromodélisme.
Nouveau sport mécanique
"La technologie de la réalité virtuelle a d'abord été employée pour les vols longue distance. Mais, les autorités ont décidé d'interdire cette pratique, car les gens cherchaient à dépasser systématiquement les limites en postant des vidéos de leurs exploits sur Internet" , explique Anthony Cake. Par conséquent, lui et ses compères décident de se lancer dans la course de drone en immersion, une activité aujourd'hui en plein essor et dont le défi s'avère autrement plus stimulant. Passer à travers des portes, slalomer entre des piquets en rase-mottes à plus de 100 km/h, la course de drone a tout pour devenir le sport mécanique à grand spectacle de demain, du moins c'est ce qu'espèrent nos ingénieurs. Et puis, cette activité respecte la législation, qui n'autorise les vols de drones qu'à partir du moment où les engins restent dans le champ de vision des pilotes, à moins de 5 km d'un aéroport et en deçà de 150 mètres de hauteur. "L'avantage, c'est que nous évoluons dans un espace fermé pas plus grand qu'un terrain de foot et avec des appareils relativement légers, de moins de 500 grammes" , remarque Yann Oeffner. D'ailleurs, l'équipe cherche à louer un terrain à un agriculteur de la région, pour des entraînements et des tests de machines.
Si la fabrication des modèles est réalisée en Chine, la recherche et le développement se font à Gland, du design à la conception du prototype. "Cinq pilotes professionnels participent à l'élaboration de nos engins, de quoi nous aider à concevoir le drone de course ultime."
Formation de pilotes
Actuellement, Lémantech Labs propose deux modèles, l'un pour faire de la photo, le second destiné à la course. Pour un modèle d'entrée de gamme avec lunettes, comptez 1000 francs. Mais, l'équipe planche sur de futurs bolides des airs. L'écurie se professionnalise et a développé un simulateur de vol de drone sur ordinateur, afin que les pilotes s'aguerrissent au maniement de ces engins. Car, Anthony Cake en est persuadé "dans peu de temps, il y aura des pilotes professionnels qui vivront de la course de drones!" DANIEL GONZALEZ