Des artistes en souffrance psychique exposent à Articom.
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Hier soir, dans les locaux de la Fondation Graap (groupe d'accueil et d'action psychiatrique) au centre Articom, à Nyon, s'est tenu le vernissage de l'exposition collective "Santerapie" (attention: jeu de mots) fruit du travail de trois artistes membres du Graap-F La Rive de Montreux.
C'est en 2012 que le projet a pris forme lorsqu'une ergothérapeute en psychiatrie, Edith Kelemen, a présenté son activité aux prestataires du pôle montreusien. Peu après, un groupe de travail s'est mis en place à l'initiative du frère d'un bénéficiaire qui désirait développer un atelier de photographie, seul moyen par lequel ce dernier parvenait à s'exprimer. Un beau geste de solidarité puisque plusieurs personnes ont répondu présent au projet.
Mme Kelemen a ainsi accompagné Koji Keiser, Patrice Airoldi et Helenka Cvopa dans leur réflexion artistique. L'exposition qui en résulte est d'abord un moyen d'ouvrir les barrières encore trop présentes entre grand public et malades psychiques, mais également de faire connaître l'ergothérapie, qui permet de "développer, retrouver ou maintenir l'autonomie physique, psychique et sociale par le biais de l'activité", écrit l'ergothérapeute sur l'un des tableaux explicatifs de la démarche. " Je pense qu'il y a plus qu'un lien médecin-malade entre le thérapeute et son patient puisque celui-ci parvient à s'ouvrir, à s'approprier des formes d'expression petit à petit. C'est très personnel", déclare timidement Jeanine Morier, responsable de la galerie ainsi que d'un groupe de dessin et peinture au sein du Graap de Nyon.
Stimulation des usagers
Les photos des oeuvres qui composent l'exhibition se partagent les divers murs entre lesquels évoluent les prestataires nyonnais, visiblement heureux d'être au coeur de l'événement. "Ils tiennent à ce que tout soit beau et propre! Ce qui se passe les stimule", commente la préposée à l'exposition, un franc sourire aux lèvres.
Diverses techniques se côtoient: peinture acrylique ou à l'huile, collages de capsules de café, sculptures, photographie, etc. Les clichés de Patrice Airoldi forment un intéressant mélange de paysages apaisants, de ciels tantôt sombres, tantôt emplis de nuages cotonneux au soleil couchant, ainsi que des moyens de transport divers qui sont pour lui une façon de voyager. "Je me sens épanoui, peu importe le sujet et le contexte" livre-t-il en guise de témoignage.
Le travail de Helenka Cvopa quant à lui, s'inspire de l'art aborigène qui l'a séduite et qu'elle s'est approprié au fur et à mesure des séances. Jeanine Morier apprécie ce type d'art. Et dans les oeuvres de Koji Keiser, au bénéfice d'une formation artistique, le contraste est intrigant entre portraits, collages et peintures originales dans des déclinaisons de bleu très intenses.
"Les gens sont souvent gênés de découvrir une exposition dans un lieu en activité", soupire la responsable de la galerie. Espérons dès lors qu'il reste des aventuriers, car si "Santerapie" a aidé certaines personnes à s'exprimer au travers de l'art, celles-ci ont aussi entamé cette démarche dans un désir de rencontre, comme le précise bien Koji Keiser: "Et comme l'amour est pur devenir et que ni code ni tradition ne peuvent le définir, je cherchais une ouverture à l'autre et aux différences en participant à l'exposition" .